ITAM vs ITSM : différences et complémentarités

08/01/2021

Expert du secteur, Stephen Mann a décidé de consacrer différents articles aux compétences relevant de la gestion informatique susceptibles de renforcer et de compléter votre politique ITSM. Dans le premier article de cette série, il se penche sur la gestion des assets informatiques (ou « ITAM » pour « IT Asset Management »). Il dresse la liste des points communs et des différences entre l’ITSM et l’ITAM avant de nous expliquer en quoi ces deux disciplines sont complémentaires.

Je suppose que mon titre a dû surprendre plus d’un spécialiste de la gestion informatique. « ITAM vs ITSM ». Cela ne devrait pas plutôt être « ITAM ET ITSM » ? Étant donné que cet article me donne l’occasion de les confronter et de les comparer, j’ai préféré opter pour le « versus ». Naturellement, ce n’est pas que l’un de ces concepts s’oppose forcément à l’autre. Bien que, dans la réalité, il est fort probable que ces deux pratiques doivent se battre pour s’arracher une part de votre budget annuel, comme tant d’autres projets d’entreprise.

Lisez la suite pour découvrir les différences entre ITAM et ITSM et pourquoi il est essentiel de conjuguer ces deux approches.

Qu’est-ce que l’ITAM ?

Comme souvent dans le monde de la gestion informatique, demandez à dix personnes de définir la gestion des biens informatiques et vous obtiendrez probablement onze réponses différentes. Je vous confie toutefois la définition de l’ITAM que j’avais donnée aux environs de l’année 2013, alors que j’abordais le sujet auprès de Forrester Research en qualité d’analyste informatique :

« C’est le fait de veiller à une gestion adéquate de tous les biens informatiques tout au long de leur cycle de vie, de leur achat à leur élimination. »

Et cette définition n’a pas vraiment changé depuis. Désormais, la gestion des biens informatiques a également sa place parmi les directives ITIL 4 relatives à l’ITSM. On y retrouve d’ailleurs la définition suivante :

La gestion des biens informatiques a pour objectif de planifier et de gérer l’intégralité du cycle de vie de l’ensemble des biens informatiques afin de soutenir l’entreprise en réalisant les actions suivantes : maximiser la valeur, gérer les coûts, limiter les risques, décider des achats, favoriser la réutilisation, faciliter la dépréciation et l’élimination des actifs, mais aussi satisfaire aux exigences contractuelles et légales.

Source : AXELOS, « ITIL Foundation: ITIL 4 Edition » (2019)

Quelle relation entre l’ITAM et l’ITSM ?

Avant de comparer l’ITSM et l’ITAM, nous devons nous pencher sur la gestion des services informatiques en elle-même. En effet, tout le monde n’est pas familiarisé avec ce concept. Si ce domaine n’a pas de secret pour vous, n’hésitez pas à passer directement à la section suivante.
Je définis la gestion des services informatiques comme suit : « L’augmentation des performances de l’entreprise induite par le renforcement de la qualité des services IT ». Une définition qui diffère de celle d’ITIL 4, qui préfère à juste titre centrer sa définition générale sur la notion de création de valeur (ou cocréation) :

Un ensemble d’aptitudes organisationnelles spécialisées visant à créer de la valeur pour les clients sous la forme de service.

Source : AXELOS, « ITIL Foundation: ITIL 4 Edition » (2019)

Retenez avant tout que si l’ITAM et l’ITSM partagent des objectifs et des résultats communs, elles affichent des bonnes pratiques résolument distinctes. Pourquoi ? Les biens informatiques ont toujours été considérés comme des objets devant être inventoriés et contrôlés, tandis que les services informatiques doivent avant tout garantir qualité et assistance aux clients.

Naturellement, ces deux approches ont toujours été amenées à se croiser, étant donné que les biens informatiques sont employés en vue de fournir des services informatiques. On notera toutefois que, depuis relativement peu de temps, il est possible de gérer certains services IT comme des biens informatiques (et vice versa). Un exemple : les services cloud. Selon moi, c’est l’une des raisons majeures pour lesquelles la gestion des biens informatiques est parvenue à se frayer un chemin parmi les bonnes pratiques ITSM d’ITIL 4, qui la définit de la manière suivante :

Processus qui consiste à planifier et à gérer l’intégralité du cycle de vie de l’ensemble des biens informatiques.

Source : AXELOS, « ITIL Foundation: ITIL 4 Edition » (2019)

La différence entre ITAM et ITSM

Commençons par une différence particulièrement évidente : les versions les plus populaires des bonnes pratiques ITAM et ITSM ont été imaginées par des acteurs bien distincts. Il est même possible de trouver des entreprises appliquant ces deux approches de la gestion informatique au sein de deux écosystèmes distincts : le premier centré sur les actifs et l’autre, sur les services (bien que j’espère qu’ils visent tous deux à améliorer la gestion et les résultats de l’entreprise dans son ensemble).

Deuxième point : les actifs et les services informatiques sont de nature différente. Une distinction souvent assez simple à opérer. En effet, proposer un service de Bureau géré n’est en rien similaire au fait (et est bien plus efficace que) de proposer un ordinateur de bureau. Certains spécialistes aiment également souligner que l’on emploie des actifs, mais que l’on consomme des services. Honnêtement, je trouve que c’est jouer avec les mots.

Mais il y a un concept qui revient systématiquement : la tangibilité. Les actifs informatiques sont des choses physiques, tangibles, vous pouvez les prendre en main. Les services, eux, sont plus abstraits, même si leur réalisation dépend toujours d’outils tangibles, physiques. Pour revenir à mon exemple de service de Bureau géré : bien sûr, ce service dépend de plusieurs actifs physiques, comme un ordinateur, un logiciel de système d’exploitation et un logiciel de productivité (ou un service cloud). Tous ces éléments constituent des actifs informatiques devant être gérés, mais ils sont rassemblés et proposés sous la forme d’un service. On peut même les associer à d’autres services, comme un service réseau, de connexion, de boîte e-mail, de solution antivirus ou Internet, etc. Ici aussi, on remarquera que tous ces services reposent sur différents actifs informatiques, comme du matériel, des logiciels et d’autres solutions tangibles.

En quoi l’ITAM et l’ITSM sont-elles complémentaires ?

En réalité, la gestion des services et la gestion des biens informatiques ne s’opposent pas vraiment. Elles sont complémentaires. Et c’est logique : sans biens informatiques, pas de services informatiques.

Et pourtant, il y a un grand « mais ».

De nombreuses entreprises recourent à la gestion de configuration des services (le terme employé par ITIL 4 pour désigner la gestion des configurations) afin d’identifier les éléments de configuration nécessaires en vue de mettre au point et de proposer des services informatiques. Mais, si la gestion de configuration des services facilite déjà la gestion des incidents, des changements (qu’ITIL 4 appelle désormais « Change Enablement »), des problèmes et d’autres pratiques liées à l’ITSM, que peut apporter de plus la gestion des biens informatiques ?

Avant de laisser totalement tomber la gestion des biens informatiques, rappelez-vous que la gestion de configuration des services et l’ITAM ne sont pas identiques. Elles n’offrent pas les mêmes opportunités ni les mêmes résultats. Mais laissons ce point de côté quelques instants et revenons à l’opposition de la gestion des biens informatiques à la gestion de configuration des services en ITSM.

Comme je l’ai écrit plus haut, la gestion des biens informatiques revient traditionnellement à inventorier et à contrôler. Pour les entreprises déjà bien établies, l’ITAM se traduit par l’optimisation de l’emploi des biens informatiques et des coûts y afférents. Elles vont par exemple s’assurer que le logiciel qu’elles emploient leur permet effectivement de créer de la valeur ajoutée pour leur société (et qu’il correspond aux conditions de licence). À de nombreux égards, la gestion des biens informatiques est une affaire de bonne gouvernance. Bien entendu, c’est également le cas de la gestion des services informatiques. Bien qu’elles constituent des disciplines distinctes de la gestion informatique, l’ITAM et l’ITSM servent donc un objectif commun : veiller à ce que les investissements de l’entreprise dans le domaine technologique répondent pleinement à ses besoins.

J’irai même plus loin en affirmant qu’elles ne servent pas uniquement un même objectif, mais qu’elles se complètent afin de faire bien plus que d’informer d’autres branches de la gestion de services IT de l’emploi des biens informatiques (comme dit plus haut). L’une ne peut pas fonctionner sans l’autre. Par exemple, la gestion des services informatiques nécessite une excellente gestion financière, ce qui demande par ailleurs une bonne gestion des biens informatiques (ou exprimé autrement, une excellente gestion des coûts liés aux actifs informatiques).

Là aussi, on pourrait souligner que la gestion des biens informatiques empiète clairement sur le champ d’activité de la gestion des configurations, mais… Dans quelle directive relative à la gestion des configurations ITIL 4 le concept d’optimisation des coûts est-il intégré ? Eh oui, dans la directive liée aux pratiques ITAM. A contrario, les activités ITAM sont d’autant plus utiles dès lors que votre servicedesk soumet la livraison et l’élimination des biens IT (tels que du matériel, des logiciels et des services) à des processus (ITSM) optimisés et formels. Non seulement l’ITAM et l’ITSM se ressemblent, mais elles sont nettement plus efficaces lorsqu’elles sont employées de manière complémentaire.

Je pourrais donner d’autres exemples, mais je suppose que vous avez désormais compris que, malgré leurs différences, l’ITAM et l’ITSM partagent de nombreuses similarités.

ITAM vs gestion de configuration de services en ITSM

Quelqu’un m’a un jour dit que la gestion des biens informatiques était nettement plus vaste que la gestion des configurations. Et je pense que c’est assez correct. La nouvelle directive ITIL 4 va d’ailleurs dans ce sens :

La bonne pratique en matière de gestion de configuration des services vise à fournir des informations fiables et précises sur la configuration de services et les éléments de configuration qui la sous-tendent où et quand cela s’avère nécessaire. Ces informations concernent par exemple la mise en place de ces éléments de configuration et leurs interactions.

Source : AXELOS, « ITIL Foundation: ITIL 4 Edition » (2019)

On pourrait croire que cet extrait concerne la gestion des biens informatiques, mais, à la seconde lecture, on remarque qu’on parle plutôt d’interactions et de configurations. Cette définition est nettement moins vaste que la précédente, où ITIL 4 conçoit la gestion des biens informatiques comme un concept incluant notamment la maximisation de la valeur, la gestion des risques, le soutien à la prise de décision et le respect des exigences légales et contractuelles.

Mieux vaut donc vous demander si vos compétences en matière de gestion des configurations respectent tous ces critères. Ce n’est pas le cas ? Votre entreprise a alors probablement besoin de mettre en place un système de gestion des biens informatiques.

J’espère que cet article aura répondu à certaines de vos questions concernant l’opposition entre ITAM et ITSM. J’ai oublié quelque chose ? N’hésitez pas à m’en informer en commentaire.

Dans le prochain article tiré de cette série, Stephen se penchera sur la gestion des opérations informatiques (ITOM). Quelle relation entre l’ITOM et l’ITSM ? Et comment évoluera la gestion des opérations informatiques dans les années à venir ? Stephen répond à ces questions et à d’autres dans son prochain article. Abonnez-vous à notre blog pour ne rater aucune publication !

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